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Comment la grossesse influence-t-elle le mariage des enfants ?

Le mariage des enfants comme réponse au risque perçu de grossesse avant le mariage

Dans de nombreux contextes où le mariage des enfants est courant, les relations sexuelles avant le mariage sont fortement stigmatisées, particulièrement pour les adolescentes. Par ailleurs, le mariage est vu comme un facteur protecteur contre le risque perçu de filles non mariées s’engageant sans une activité sexuelle ou tombant enceinte, synonymes de honte et d’insécurité financière potentielle pour elles-mêmes et leurs familles.

Dans les contextes caractérisés par des niveaux élevés de mariages des enfants, l’initiative d’apprentissage More Than Brides Alliance (MTBA) note que les filles sont fréquemment considérées comme éligibles au mariage une fois qu’elles ont atteint la puberté. La maturité physique ayant lieu pendant la puberté est comprise comme marquant le début de la transition de la fille vers l’âge adulte.

Les réflexions issues de la recherche qualitative de la MTBA avec des adolescentes, leurs parents et les responsables de mise en œuvre de l’étude

Nos parents ont peur que leur fille tombe enceinte alors qu’elle est toujours chez eux. Quand elle commence à avoir ses règles et qu’ils remarquent des changements dans son comportement, même si elle est toujours à l’école, ils la reprennent et la marient.

– Fille mariée, Mali

Il y a une forte opposition aux relations sexuelles avant le mariage. Donc, les parents craignent que leur fille s’engage dans des relations sexuelles avant le mariage et donc, ils la forcent à se marier pour éviter ce problème.

– Responsable de la mise en œuvre du programme, Ethiopie

Pour les adolescentes —qu’elles aient une relation romantique ou un/des partenaire(s) sexuel(s) ou non – le risque réel ou perçu de grossesse peut mener à un mariage d’enfants dès qu’elles sont physiquement capables de concevoir et sont donc considérées par d’autres dans la communauté comme étant éligibles pour le mariage. La Figure 1 (ci-dessous) illustre cette voie où le risque d’une grossesse fortement stigmatisée et, dans certains, cas, illégale modère le lien entre la perception de l’éligibilité d’une fille au mariage et le mariage lui-même. Ici, le mariage précède la grossesse et la grossesse adolescente est un critère secondaire du mariage des enfants.

La grossesse avant le mariage comme facteur du mariage des enfants

Alors que dans de nombreux contextes, le risque d’une éventuelle grossesse avant le mariage sert à accélérer le mariage et la procréation pour les filles, ce modèle n’est pas universel. La Figure 2 (ci-dessous) illustre les données disponibles des enquêtes démographiques et de santé les plus récentes sur la proportion des femmes âgées de 20 à 24 qui reportent avoir eu des relations sexuelles dès l’âge de 18 ans (orange) et la proportion qui déclarent avoir été mariées à l’âge de 18 ans (bleu) pour les pays inclus dans l’initiative d’apprentissage MTBA. Ces indicateurs démontrent une variation significative dans la prévalence des relations sexuelles avant le mariage et les grossesses dans les différents lieux. Alors que ces données montrent uniquement des associations, elles suggéreront des voies par lesquelles la grossesse peut mener au mariage des enfants.

Figure 2 : % de femmes de 20 à 24 ans, ayant été mariées pour la première fois / ayant eu des relations sexuelles pour la première fois à l’âge de 18 ans

Par exemple, au Pakistan, au Niger, en Inde, et au Bangladesh, le nombre de femmes déclarant s’être mariées à l’âge de 18 ans est plus important que celles déclarant avoir eu des relations sexuelles à cet âge. Cela suggère que la première relation sexuelle a généralement lieu dans le mariage. Le risque perçu de grossesse avant le mariage — et les menaces associées pour l’éligibilité au mariage d’une fille et l’honneur de la famille — semble jouer un rôle dans l’incitation au mariage des enfants.

Inversement, en Ouganda, au Mali, au Malawi, et en Ethiopie, la première relation sexuelle déclarée avant l’âge de 18 ans est plus courante que le mariage avant 18 ans (voir Figure 2). Cela suggère que dans ces pays, sans utilisation répandue de la contraception, un nombre plus important d’adolescentes sont susceptibles de tomber enceintes en dehors du mariage et, par conséquent, de se marier tôt.

Dans les pays où l’activité sexuelle avant le mariage est plus courante, la grossesse peut accélérer le mariage pour les filles qui s’engagent dans des relations [romantiques] dans l’adolescence. Cela peut être dû à une combinaison des facteurs, dont :

  • Des normes sociales qui stigmatisent les enfants nés en dehors du mariage, leurs mères et les familles de leurs mères ; ou
  • Les attentes que les hommes ou les garçons qui mettent une partenaire enceinte en dehors du mariage prendront leurs responsabilités en mariant la fille et en apportant un soutien financier à la mère et à l’enfant ; ou
  • Le désir des adolescentes d’avoir une certaine marge de manœuvre dans leur sélection d’un mari ; ou
  • Le désir des adolescentes de démontrer leur féminité par la procréation.

Dans des pays qui affichent ces normes, la grossesse agit comme un médiateur sur la voie causale entre la relation romantique d’une adolescente et le mariage des enfants (voir Figure 3). Cela vaut pour les filles non mariées qui tombent enceintes en dehors d’une relation romantique. Dans certains contextes, le commerce du sexe — qui décrit les comportements allant de l’échange de rapports sexuels contre des cadeaux dans des relations à la prostitution formalisée — mène à une grossesse avant le mariage et par conséquent, au mariage.

Quand les femmes et les filles ont un accès restreint à des opportunités éducationnelles ou de génération de revenus, le mariage peut être la seule option pour les femmes d’assurer leurs moyens de subsistance. La grossesse accélère ce besoin pour les filles de se marier pour assurer que leur enfant naisse et bénéficie d’un soutien financier dans le mariage.

Certains ont un enfant quand ils se fréquentent. C’est courant ici et cela explique la plupart des mariages précoces. Ils ont un enfant alors, ils se marient. Les jeunes se marient à cause de leurs fréquentations.

– Informateur clé, Malawi

Dans la région du projet, les relations sexuelles avant le mariage parmi la population tribale dans des couples identifiés sont acceptées socialement. Il arrive que le couple commence une relation sexuelle à l’adolescence, entre 15 et 17 ans, sans une bonne connaissance de la SSR et des services connexes, ce qui est difficile à aborder dans le projet. Par ailleurs, la plupart des familles pensent que le mariage reste une solution pour assurer la sécurité de la fille.

– Responsable de la mise en œuvre du programme, Inde

La grossesse adolescente [est] associée à la disposition au mariage. Les filles qui tombent enceintes sont forcées de se marier avec l’homme responsable de la grossesse même si elles ne sont pas prêtes ou que cela va à l’encontre de leur volonté.

– Responsable de la mise en œuvre du programme, Ouganda

La plupart des filles, parfois dès l’âge de 13 ans, tombent dans la prostitution avec des hommes plus âgés qui fréquent des lieux de boisson dans des centres commerciaux. Les filles se retrouvent dans la prostitution principalement pour répondre à leurs besoins de base. Quand le soir tombe, on commence à remarquer des files de filles autour des pavillons ou des lieux de boisson, attendant les clients. Dans ces pratiques, les filles se retrouvent enceintes et certaines sont contraintes dans des mariages d’enfants.

– Responsable de la mise en œuvre du programme, Malawi

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